Notre-Dame-du-Saguenay

  À chaque hiver, Charles-Napoléon Robitaille, voyageur de commerce pour la maison P. Garneau & Frères de Québec, prenait la route du Saguenay avec ses tissus, ses sirops, ses outils et tout ce qui pouvait être indispensable aux familles qui vivaient isolées le long du fjord. Celui qu’on désignait familièrement comme le « peddler », suivait alors le chemin d’hiver entre Baie-St-Paul et Grande-Baie pour emprunter ensuite le pont de glace balisé de Chicoutimi pour rendre visite aux familles qui vivaient dans la paroisse Sainte-Anne, sur la rive nord de la rivière. Cette route hasardeuse lui valut d’ailleurs de voir la mort de très près.

    Nous sommes en 1878 et Charles-Napoléon Robitaille glisse lentement sur la surface durcie de neige et de glace. Direction Chicoutimi. Comme d’habitude, il fait confiance à sa jument canadienne dont les grelots teintent dans le froid alors que lui s’est réfugié sous les peaux et les couvertures, les pieds bien à plats sur des briques chaudes. Le parcours n’est pas vraiment dangereux mais il arrive que la glace s’ouvre sous l’effet des marées, ce qui force une vigilance constante. En un instant, les clochettes se mirent à vibrer nerveusement et un grand hennissement se fit entendre jusqu’à la berge avant que les eaux glacées n’engloutissent le cheval, la carriole et le vendeur.

    Charles-Napoléon Robitaille ne s’en est sorti que par miracle, récupérant même son cheval et sa carriole. Sans la promesse faite à la Vierge de l’honorer d’une façon exceptionnelle si elle le sauvait, le marchand itinérant ne se serait jamais tiré hors des eaux glacées et n’aurait certainement pas survécu à la consomption qui le cloua au lit et lui valut les derniers sacrements.

 
 

    Une fois rétabli, Robitaille chercha ce que pourrait être ce « quelque chose d’important » qu’il avait promis à Marie. Dominique Racine, le premier évêque de Chicoutimi, vint l’inspirer en lui proposant son propre rêve… une statue colossale sur le gigantesque Cap Trinité que tant de touristes venaient déjà admirer à bord des bateaux de croisières. D’ailleurs, Mgr Racine n’hésita pas à amener Charles-Napoléon Robitaille a bord d’un des bateaux blancs de la Canada Steamship Line pour lui montrer l’emplacement spectaculaire qu’il avait en tête, ce qui acheva de convaincre le miraculé.

     Une souscription populaire aida à amasser les fonds et le promoteur dû puiser la somme de 1 750 $ dans ses propres poches pour arriver à payer la sculpture qui avait été commandée à Louis Jobin de Portneuf. Lui aussi se rendit au pied du cap Trinité à bord d’un bateau de croisière afin d’évaluer les dimensions de son œuvre et c’est alors qu’il décréta qu’elle devrait avoir environ 30 pieds de hauteur. Elle deviendrait la plus grande statue jamais sculptée en Amérique du Nord, un titre qu’elle détient toujours apparemment.

    C’est lors de sa bénédiction que Mgr Racine, à la fin d’une envolée oratoire mémorable, déclara que tous les dévots qui viendraient réciter trois Ave au pied de la Vierge obtiendraient 40 jours d’indulgences. À partir du moment où la Vierge trôna sur son socle, elle changea quelques fois de vocable devenant la Madone du Saguenay, puis Marie Immaculée, Notre Dame du cap Trinité et, finalement, Notre-Dame du Saguenay. Mais, pour plusieurs, elle demeure tout simplement la Vierge.

LA STATUE NOTRE-DAME-DU-SAGUENAY EN BREF :

  • Hauteur de la statue :
    7,5 m sans la base
    9 m avec la base
  • Poids : 3 tonnes
  • Matériel : sculptée en trois blocs de pin blanc et recouverte de minces feuilles de plomb
  • Inauguration : 15 septembre 1881
  • Altitude : 180 m

Sources:

http://www.histoiresoubliees.ca/article/la-grande-dame-du-saguenay