Sauvés grâce à un songe

 
 

 Les Onnontagués (Iroquois) avaient décidé de massacrer cinquante Français habitant à Gannentaha. Avertis par les missionnaires, nos Français résolurent de quitter la contrée et de descendre à Montréal. Dans un grenier, tenu soigneusement fermé, ils réussirent à construire quelques bateaux plats. Le vingt mars tout était prêt. Un jeune Français, adopté par un chef Iroquois, déclara qu’il avait eu un songe ; il fallait faire un festin à « tout manger » s’il ne voulait pas mourir bientôt.

 « Tu es mon fils, répondit l’Iroquois, je ne veux pas que tu meures ; prépare le festin et nous mangerons tout. »

 Les Français fournirent les provisions en abondance : porcs, outardes et poissons furent jetés dans la grande bouilloire qui ne servait qu’aux occasions solennelles. Tous les Iroquois furent invités au festin et mangèrent copieusement pendant que des Français jouaient des instruments de musique.

 « Aie pitié de nous, dirent les Iroquois, envoie-nous reposer ». – « Vous voulez donc que je meure », répondit le jeune Français. À ce reproche, les Sauvages se remirent à l’œuvre avec l’énergie du désespoir.

 Pendant ce temps, les Français avaient mis à l’eau toutes les embarcations. Tout étant prêt, le fils adoptif du chef sauvage déclara aux Iroquois qu’ils pouvaient cesser de manger et que lui ne mourrait pas.

 Gorgés de viandes, les Iroquois furent vite plongés dans un profond sommeil. Les convives français se hâtèrent de rejoindre leurs compagnons. En silence, ils s’embarquèrent, coururent les plus grands risques, mais arrivèrent sains et saufs à Montréal le 3 avril 1658.

 

Les Onnontagués s’étant levés fort tard et constatant le grand silence qui régnait partout, crurent que les Français étaient en prières ; ils attendirent longtemps. Enfin, ils enfoncèrent les portes et ne trouvèrent personne. Comme une neige épaisse tombée pendant la nuit avait fait disparaître toutes les traces, les sauvages crurent qu’un puissant manitou avait enlevé les Français dans les airs et que bientôt ils reviendraient pour se venger.

Sources :

Élie de Salvail, 366 anniversaires canadiens, pages 160-162