Vénérable Antoine Kowalczyk
Naissance et jeunesse :
Antoine Kowalczyk est né le 4 juin 1866 en Pologne. Il était le sixième enfant d’une famille de douze. Son père et sa mère étaient de très bons catholiques. Dès son jeune âge, Antoine fut marqué par les histoires sur les Pères du désert que son père lui racontait.
Quand Antoine eut terminé ses études primaires, ses parents le retirèrent de l’école parce qu’ils avaient besoin de lui pour les aider dans leur petite ferme. Le garçon aida ses parents pendant trois ans. Puis, encouragé par ses parents, il devint apprenti chez un forgeron à Krotoszyn.
Hambourg, Allemagne :
À l’âge de vingt-quatre ans, Antoine partit travailler à Hambourg, en Allemagne. Dès que ses compagnons découvrirent qu’il était catholique, ils le maltraitèrent avec un langage grossier, et quand le moindre problème survint au travail, ils prononcèrent des paroles blasphématoires contre les choses de Dieu. Le pauvre Antoine était confus, en colère et impuissant. Ayant peur que lui aussi ne devienne comme ses collègues de travail, il se mit un jour à genoux dans un lieu public et cria au ciel sa foi en Dieu.
Tous ces mauvais collègues, ces abus et ce mauvais langage affectèrent le pauvre Antoine qui tomba très malade. Il ressentit une terrible douleur dans les yeux et le médecin lui dit qu’il pourrait devenir aveugle. Sur le chemin du retour, il s’arrêta dans une église et s’est agenouillé devant l’autel de Notre-Dame. Alors qu’il priait, il se résigna à la sainte volonté de Dieu. Il a ensuite fait le chemin de croix et à la sixième station, il ressentit un changement physique et enleva le bandage. Il pouvait maintenant voir ! Dieu l’avait guéri et pour l’en remercier, il fit le Chemin de croix.
Les Oblats :
Un peu plus tard, Antoine partit pour la Rhénanie, qui était une région catholique en Allemagne. Tout en cherchant un emploi à Cologne, il se rendit fréquemment dans une église franciscaine. Lors de l’une de ces visites, il ressentit le besoin d’aller à Mulheim. Il y trouva un travail et une chambre chez les Prunnenbaum, une famille catholique. Lorsque Madame Prunnenbaum apprit à mieux connaître Antoine, elle lui parla de son fils qui étudiait chez les Oblats, chez qui il y avait des missionnaires en Afrique, en Asie et en Amérique du Nord. Elle lui dit également que les Oblats travaillaient parmi les pauvres et avaient désespérément besoin d’aide.
Au début, Antoine pensait être trop vieux pour aller les Oblats, mais il décida finalement de les rejoindre. Son père s’y opposa, mais son confesseur lui dit : « Dieu passe avant les parents. Si Dieu vous appelle, répondez à son appel ! » Antoine écouta donc son confesseur et commença son noviciat le 21 septembre 1891 à Saint-Gulach, en Hollande.
Nomination au Canada :
Le 26 octobre 1893, le frère Antoine renouvela ses vœux pour un an et demanda à être envoyé dans les missions étrangères. Ce n’est qu’en 1896 qu’il put partir pour le Canada, suite à la demande de Monseigneur Grandin. Il fut donc nommé à la mission de St-Albert dans ce qui est aujourd’hui l’Alberta. On dit alors à l’évêque : « Frère Antoine, c’est le meilleur des frères convers, un vrai saint… »
Un jour, alors que le Frère antoine voyageait avec Monseigneur Vital Grandin et d’autres personnes, la caravane fut prise dans un marais en Saskatchewan! Le frère traversa à pied ! Il monta sur une butte et se mit à prier ! Les autres se plaignaient : Qu’est-ce qui lui prend ce petit fou de Polonais? Tout ce temps perdu inutilement ! Pense-t-il nous tirer avec des prières ? » – Grandin répliqua : « Mes bons amis, ne vous moquez pas ! Ce petit frère, c’est un saint ! » Après une heure de prière, le bon Frère se leva, et puis dit au conducteur de faire avancer les chevaux. Ceux-ci avancèrent sans peine !
Le frère Antoine était connu pour faire constamment des miracles. Un jour, des religieuses brisèrent une serrure ! On demanda à Frère Antoine son aide ! Celui-ci leur demanda: « Avez-vous dit un Ave (Je vous salue Marie)? – Non », répondirent-elles. Il se mit à genoux et pria ! Puis se leva et ouvrit la porte sans aucune difficulté ! Puis il dit aux sœurs: « Si vous pas confiance maintenant en la Sainte Vierge, ça bien mal ! » (son français était relativement pauvre).
Terrible accident :
Au Lac la Biche, le Frère Antoine travailla dur et passa de nombreuses heures à prier. Il gardait toutes les machines en excellent état de fonctionnement. En bref, il donna un bon exemple à toute la communauté. Dieu donna cependant au Frère Antoine une très lourde épreuve. Un bon matin de 15 juillet 1897, le saint frère se fit broyer le bras par une machine…il cria et tomba par terre presque inconscient ! Frère Sylvestre courut l’aider et le relever ! Frère Antoine s’écriait: « C’est le Bon Dieu qui l’a voulu » ! Frère Antoine embrassa ensuite les blessures de sa main.
Il fallut quatre jours pour qu’Antoine atteignit l’hôpital d’Edmonton et lorsqu’il arriva, la gangrène s’y était installée et ils durent l’opérer immédiatement. À l’hôpital, il n’y avait pas de médicaments pour l’endormir. On voulut l’attacher pour l’amputer, mais le saint Frère répliqua : « Non, vous pas faire ça ; vous le donner mon crucifix ; cela suffit » il le prit, le regarda et pria… « Allez, je suis prêt », dit-il, puis de sa main il tint fermement le crucifix. Le scalpel pénétra dans la chair vive ; le sang gicla, mais aucune plainte, pas le moindre mouvement. Le chirurgien coupa les nerfs, les os craquèrent… Mais le frère resta immobile.
Il fallut un mois de convalescence pour que le frère puisse sortir de l’hôpital. Sa plus grande crainte était que les supérieurs le jugent inutile avec un bras en moins et qu’ils lui demandent de quitter la communauté. Mais ce ne fut pas le cas. C’est ce qu’il exprima dans une de ses lettres qu’il écrivit à prêtre : « Permettez au pauvre Frère Kowalczyk de vous écrie un mot avant de retourner au La Labiche (Lac La biche) – Vous avez appris le malleur (malheur) qui est arrivé à moi le 15 juillet dernier de faire casser ma main droite par l’engin. Le révérend Père Grandin et les saurs (soeurs) amène(nt) moi à l’hopital Edmonton, et le Doctoeur a coupé ma main le 22 juillet – resté à l’hopital 4 semaines, ji (je) suis bien à présent venu à Saint Albert la smaine (semaine) dernière. Je vas partus (vais partir) pour le Lac Labiche bientôt. Mon bon Père, moi bien de la peine quand j’ai cassé mon bras – être moi jamais Oblat à présent mais le Bon Père Grandin dit à moi ça fait rien, vous serez Oblat – Monseigneur Grandin dit la même chose et Monseigneur Legal aussi – Et bien le Père Grandin content, Monseigneur content, moi content, j’espère que le Révérend Père Général content et vous aussi, mon bon Père. Moi, jamais capable de remercier assez pour toutes les bontés de Monseigneur, des Révérends Pères, des bons frères et bonnes Saurs (Soeurs) pour moi pauvre pécheur. Moi prie le Bon Dieu de les bénir et payer pour moi – Daignez me donner votre bénédiction Votre respectueux – Frère Antoine Kowalczyk
Mission Saint-Paul-de-Métis :
En 1897, le Frère Antoine et le Frère Moelic furent envoyés pour aider le Père Thérien à la mission de Saint-Paul-de-Métis. Tous les trois installèrent une scierie et un moulin à farine. Pendant dix ans, le Frère Antoine fut ingénieur, mécanicien et jardinier de la mission en difficulté.
Une année, il y eut cependant trop de pluie qui causa une pénurie de nourriture. Pour pallier la pénurie de nourriture, le Supérieur décida que la mission devait élever des porcs. La grêle, cependant, avait détruit les récoltes et les porcs étaient affamés. Un champ de navets se trouvait au-delà d’un champ d’avoine et le Supérieur a dit au Frère Antoine : « Frère Antoine, vous allez conduire vos cochons dans le champ de navets! Vous irez par le sentier qui traverse le champ d’avoine! Mais prenez garde à ce qu’aucun animal ne mange de l’avoine! – Mais, mon Père, c’est impossible! – Impossible? Ce mot n’est pas français! Allez!
Le frère obéit. Les cochons affamés se bousculèrent pour sortir de l’enclos! Arrivés au champ d’avoines, Antoine pria! Il se leva et dit aux cochons: « Je vous défends bien de toucher à cette avoine! » Pendant ce temps-là, devant le presbytère, plusieurs frères, sœurs, le supérieur et des métis regardèrent: Pauvre Frère Antoine… « Oh? Quelle merveille! Il commande aux pourceaux et les pourceaux lui obéissent!
Un crochet à la main :
Le 4 octobre 1911, Frère Antoine fut transféré au Collège St. John’s à Edmonton. Il y était forgeron, blanchisseur, jardinier, sonneur de cloches, sacristain, et il s’occupait des poulets et autres animaux. Cela devint difficile à cause de sa main manquante. En 1912, Frère Antoine et un prêtre se rendirent à Winnipeg pour faire installer un crochet métallique sur son bras, car il avait beaucoup de difficultés à travailler manuellement. Quelques semaines après qu’Antoine apprit à utiliser le crochet, on lui confia le poste de concierge.
Chaque année en septembre, lorsque les garçons retournaient à l’école après leurs vacances, beaucoup d’entre eux se tournaient vers le Frère Antoine pour lui demander un service, car il était un bon ami pour les aider. Il réparait une montre, affûtait des patins, coupait la clé d’un casier ou réparait leurs lunettes.
Il était aussi connu pour sa dévotion et son amour envers Marie, notre Sainte Mère. Lorsque la machine à laver refusait de fonctionner, il se mettait à genoux, disait un « Ave » et la machine se mettait en marche. Il obtint aussi de son supérieur la permission de construire une grotte pour Notre-Dame de Lourdes au St. John’s College.
Frère Antoine faisait toujours bien son travail pour l’amour de Dieu. Il travaillait dur et il priait beaucoup. Un jour, il dit à un ami qui pensait que la règle était dure : « J’ai 72 ans. Je trouve aussi la règle difficile. Mais tu dois te plier et briser ta volonté ». Il avait également un bon sens de l’humour et plaisantait souvent avec les gens. Et quand il était le sujet d’une blague, il était le premier à rire de lui-même.
Mort du saint frère :
Le 17 septembre 1945, le Frère Antoine n’est pas apparu dans la chapelle, ni n’est venu pour son repas. Quand quelqu’un est allé le voir, le pauvre Frère Antoine fut retrouvé dans sa chambre du Collège Saint-Jean. Assis sur le bord de son lit, « son visage était meurtri et enflé, ses yeux noircis et injectés de sang », écrit le père P.J. Klita dans une courte histoire de Kowalczyk.
Le frère oblat révéla plus tard qu’il s’était battu avec le diable toute la nuit. Il ne fut plus jamais le même homme après cette confrontation traumatisante et sa santé déclina lentement jusqu’à sa mort deux ans plus tard. Le 8 juillet, le Frère Antoine se rendit à St-Albert pour sa retraite annuelle. Deux jours plus tard, il fut retrouvé paralysé et incapable de parler. Il reçut les derniers sacrements et mourut le 10 juillet 1947.
Sources:
BRETON, Paul-Émile, OMI, Forgeron de Dieu, Éditions de l’ermitage